Moulin à café
On a aujourd’hui du mal à imaginer qu’il fut un temps où on achetait son café quotidien en grains. De café moulu, il n’était pas encore question et de moulin à café électrique non plus. Qui voulait chaque jour boire du café s’armait donc de patience et d’un antique moulin à manivelle.
Au début c’était très amusant et je me portais volontaire pour verser les grains dodus dans le réservoir du moulin. Ensuite, on s’asseyait fermement sur une chaise en bois ou un tabouret et on commençait à tourner la manivelle grinçante, tandis que le café moulu tombait lentement dans un petit réceptacle à tiroir.
Je n’avais pas beaucoup de patience pour tourner la manivelle et je m’interrompais sans cesse pour me livrer à mon jeu favori : ouvrir le tiroir et mesurer la lente progression du petit tas marron. A ce train-là, le tas ne montait pas vite, si bien que ma mère ou ma grand-mère, plus soucieuse d’efficacité que moi, s’emparait de l’engin et s’attelait à son tour à la tâche. Je demeurais dans la cuisine à humer les arômes, attendant que tout le café soit enfin moulu pour reprendre la main et avoir le privilège de transférer le contenu du tiroir dans une grande boîte métallique, l’une de ces boîtes de lait Guigoz que Maman conservait afin d’y ranger les produits d’épicerie.